De retour d’un voyage photo en Finlande pour photographier ours bruns, loups gris et gloutons, j’ai voulu partager avec vous mon expérience. Bonne lecture.
L’ours brun en Finlande
L’Ours brun (Ursus arctos) est l’une des principales espèces d’ours au monde. On le retrouve dans l’hémisphère nord sur trois continents : l’Europe, l’Amérique et l’Asie. En Europe, c’est la sous-espèce Ursus arctos arctos que l’on peut rencontrer dans plus de 20 pays : Slovénie, Croatie, Roumanie, Suède et Finlande principalement si on exclut la Russie de l’Europe.
L’ours brun d’Europe est un ours omnivore. Il mesure jusqu’à 2 m et peut peser 300 kg pour les plus gros individus. Sa fourrure va du beige au noir et le préserve du froid grâce à trois épaisseurs de poils. L’ours brun mue pendant l’été pour ne pas avoir trop chaud. Si sa vue est relativement mauvaise, son ouïe et son odorat sont excellents.
L’ours brun entre en Finlande en hivernation à la fin octobre et jusqu’au mois d’avril de l’année suivante. Il dort beaucoup dans sa tanière et vie sur ses réserves de graisse. Il hiverne et n’hiberne pas. Quelle différence ? Les animaux qui hibernent, comme la marmotte, réduisent leur métabolisme et leurs battements de cœur et font baisser la température de leur corps. L’ours brun cherchera quant à lui une petite tanière pour s’isoler du froid et perdre le moins de calories possibles pendant sa pause hivernale.
La maturité sexuelle arrive vers l’âge de 4 ans. Les femelles n’ont pas de ménopause et peuvent se reproduire jusqu’à la fin de leur vie. Les accouplements ont lieu entre mai et juillet. Une même femelle peut s’accoupler avec plusieurs mâles, ce qui permet de protéger les petits de tous les mâles avec qui elle a eu un copulation. Chez l’ours brun, l’implantation de l’oeuf est bloquée deux ou trois jours après la fécondation et ne reprend que pendant la pause hivernale. La gestation est courte. Elle ne dure que 2 mois. Les oursons naissent dans la tanière en janvier février. Ils allaitent sur les réserves de graisse de la maman ours. Une ours a une portée tous les deux à quatre ans.
L’Institut finlandais des ressources naturelles (Luke) (en finnois : Luonnonvarakeskus ) s’occupe du suivi des ours bruns (entre autre). Le nombre d’ours en Finlande est compris entre 2000 et 2300 individus. Ce chiffre varie d’une année à l’autre.
S’il n’y avait pas la chasse à l’ours, la population se porterait mieux mais environ 400 à 500 ours sont tués chaque année en Finlande. 85 % des ours chassés en Finlande entre 2019 et 2022 ont été abattus à moins de 100 km de la frontière orientale du pays. Et ce n’est pas la nouvelle loi qui vise à assouplir les restrictions sur la chasse aux grands prédateurs en Finlande qui va arranger la situation de la population d’ours bruns du pays.
Présentation des affûts pour photographier l’ours brun en Finlande
Le centre dispose de quatre sites pour photographier l’ours brun dans des environnements différents :
- des affûts face à une tourbière
- des affûts face à un lac
- des affûts forestiers
- des affûts dans un canyon. Ce dernier est plus dédié au glouton
Le centre dispose de nombreux affûts de 1 à 10 places. Les plus confortables ont des lits, un toilette sèche et de l’espace, souvent les affûts les plus récents. Alors que d’autres sont plus rustiques. Il faut alors dormir sur le tapis de sol en mousse et faire ses besoins dans un seau. Chaque affût dispose de manchons dans lequel on fait passer les objectifs photo et d’un siège ou d’une chaise pour chaque photographe.
Quels autres animaux voir aux affûts ours bruns ?
L’ours brun est l’animal le plus présent autour du centre et c’est celui qui sera le plus photographié. Il y a aussi de bonnes chances d’observer et de photographier le glouton et le pygargue à queue blanche. Le loup gris passe occasionnellement à une fréquence d’une fois par semaine environ.
Du côté des oiseaux, en plus du pygargue à queue blanche, l’aigle royal peut occasionnellement être observé en fin d’hiver, mais les oiseaux les plus communs sont les goélands cendrés, bruns et argentés, la mouette rieuse, la corneille mantelée, le corbeau, la bergeronnette grise, l’hirondelle rustique et le pic épeiche. Des chevaliers (cul-blanc, guignette, sylvain, aboyeur…), garrots à oeil d’or, milans noirs, grives s’observent selon les affûts.
Des appâts sont-ils utilisés pour attirer les ours ?
Oui, des appâts sont utilisés. L’odorat de l’ours brun est extrêmement développé. La nourriture attire les ours. Le centre utilise les appâts suivants : carcasse animale (cochon, rennes, élan…), poisson et croquette végétale.
Les appâts ne suffisent pas à nourrir un ours, mais ils permettent de l’attirer devant l’affût photo. Ces techniques sont utilisées par les chasseurs, mais ici, il n’est question que de photographie.
Notez bien que la présence d’appâts ne garantie pas la venue des ours mais augmente fortement les chances d’en photographier.
Sans ces appâts, les chances de photographier un ours brun sont proches de zéro. Car l’animal a peur de l’homme.
Combien de temps dure un affût photo ?
La durée d’un affût photo ours brun en Finlande varie selon la saison. Durant l’été en juillet, l’affût dure 15h et se déroule principalement de nuit. À cette époque de l’année, la nuit est cependant très courte (quelques heures).
Comment se passe concrètement une journée type d’observation des ours bruns ?
La journée type dépend de la saison et de la durée du jour et de la nuit.
Voici le découpage d’une journée type d’avril à fin août :
- Check-in le midi
- Déjeuner à 14h30
- Route pour les affûts à 16h00 et installation
- Sortie de l’affût à 7h00
- Petit-déjeuner
- Temps libre jusque 14h30 (repos, affût passereaux, écureuils roux, pics épeiches au camp, balade, tri et retouche des photos…).
Retour sur mes affûts pour photographier l’ours brun
Affût tourbière à la fin de l’hiver
J’ai réalisé l’affût tourbière à deux reprises à la fin avril/début mai, d’abord en 2022 puis en 2023. En 2022, j’avais pu y observer deux ours bruns et un glouton.
En 2023, voici les observations réalisées :
16h15 : 1 mâle passe devant l’affût
20h24 : 1 autre mâle arrivent
21h20 : 2 jeunes ours arrivent devant l’affût. Ils sont alertes, marchent assez vite. Quelques minutes plus tard, les deux individus regardent dans le même sens. Un ours un peu plus gros arrive. Peut-être une grosse femelle ou un jeune adulte. Le plus frêle des deux jeunes prend immédiatement la fuite. L’autre ours s’écarte, mais reste dans les parages.
Puis, dans la foulée, un énorme mâle approche. Il finit par se poster à 4 m de l’affût puis repart. Il est 22h00.
Pendant la nuit au moins 3 autres ours viendront.
7h09 : un mâle arrive par le versant opposé de la tourbière. Il s’approche lentement. Il sort des pins et passe sur la gauche de l’affût puis s’en va dans la forêt derrière nous.
Sur cet affût, nous avons réalisé 7 observations d’ours bruns, sans compter les observations nocturnes, d’au moins 5 individus différents.
Affût forestier : le festival des ours bruns
Lors du voyage photo 2024, le premier affût que nous faisons est un affût forestier en plein cœur de la taïga. Nous sommes en réalité dans deux affûts voisins.
18h20, des dizaines de goélands et mouettes rieuses viennent faire une razzia sur les saumons. 10 minutes plus tard, un pic épeiche juvénile mâle vient se poster quelques secondes sur le tronc d’un conifère, puis s’en va.
19h00, un ours arrive agité, en courant, et ralentit quand il arrive devant les affûts.
20h53, le même ours arrive par le nord-est. Il reste 3/4 minutes devant les affûts et s’en va avec un morceau de saumon dans la gueule.
Il repasse à 21h00 et repart 25 minutes plus tard. C’est un mâle. Nous avons pu voir ses appareils génitaux.
23h20 alors que la lumière baisse à vitesse grand V, une femelle ours vient s’alimenter devant l’affût. Confiante, elle s’assied même sur le tapis de baies qui tapissent le sol de la taïga.
Elle partira une première fois en courant à 23h50 après que des goélands lui aient fait peur. Elle reviendra deux minutes plus tard. Je tente une photo à 51200 isos. Aïe aïe aïe. Je pose l’appareil photo et regarde. Elle dégarpit à 23h55 avec l’arrivée d’un autre jeune mâle.
23h55, un quatrième ours se pointe. Les deux se tolèrent.
Nous nous couchons alors que les deux ours sont face à l’affût.
3h00, le réveil sonne. Je prends place, un ours est devant moi. Il est assis et mange. À 3h16, il se lève soudainement et s’en va sans même jeter un regard vers les affûts.
4h00, la grive draine chante à tue-tête.
4h29, un jeune ours mâle avec des poils blancs sur le torse arrivent. 4h37, l’ours à la tâche blanche s’en va, car un ours plus massif arrive. La hiérarchie est établie sans aucun doute. Il revient quelques minutes plus tard mais garde ses distances pour ne pas froisser le plus gros mâle. Il déambule à une dizaine de mètres de lui. À un moment, le gros mâle se retrouve face à lui. Il lui a suffit d’avancer de deux pas en feintant une charge pour que le plus jeune ours s’éloigne un temps. Les positions des deux ours reviennent à l’état initial puis le plus gros décide de partir, ce qui provoque le départ du second également.
5h, trois pics épeiches passent d’un tronc à une souche. La femelle nourrit son jeune.
5h37, une femelle arrive tout agitée. Elle reste quelques instants puis s’en va avec l’arrivée d’un mâle imposant. Ils reviennent quelques minutes plus tard. La femelle s’en va, le mâle mange un moment puis part dans la direction où est partie la femelle. Ils reviennent une troisième fois. Le mâle suit la femelle comme son ombre avec l’espoir de la saillir.
Affût tourbière : ours et glouton
À notre arrivée dans l’affût à 16h30, goélands (bruns, argentés et cendrés), mouettes rieuses et corvidés sont déjà-là.
Le Milan noir est la première espèce que je photographie. Le pygargue à queue blanche nous occupera ensuite pendant près d’une heure. Tantôt posé sur une branche, tantôt en vol, il n’est pas simple à immortaliser à cause des manchons qui limitent notre amplitude de mouvement avec l’appareil photo. Du coup, pour l’occasion, je lâche la tête pendulaire pour un bean bag. Cela me laisse plus de souplesse d’utilisation, car le matériel photo est positionné plus bas.
17h57, un coucou gris mâle vient se poser sur une branche à l’extrémité de l’affût. Trop excentré, nous ne pouvons que le regarder. Il partira plus loin dans une rangée d’arbustes qui délimite la tourbière.
19h00. Des bergeronnettes grises vont et viennent devant l’affût. Mais, toujours point d’ours.
19h18, deux pics épeiches passent le bout de leur tête pendant quelques secondes et disparaissent derrière l’affût.
20h00, toujours pas d’ursidé. Il faut bien comprendre que la présence d’appâts ne garantie pas la venue de l’ours brun. L’attente s’installe, l’ennui aussi. Le plus dur, c’est de s’empêcher de faire du bruit, de ne pas discuter avec son voisin d’affût. C’est tentant, mais comment un glouton viendrait si c’est le bazar dans l’affût. Pour être franc, nous n’y parvenons pas toujours.
10:15 Saturday night. L’ours à la marque blanche sur le dos arrive par le sud-est. Il marche d’un bon pas. La luminosité est déjà basse. Pas d’autres choix que de faire monter les isos. Fort heureusement, les logiciels de débruitage sont aujourd’hui efficaces. Il passe d’un appât à un autre et repart 45 minutes plus tard. Il était nettement moins nerveux qu’hier.
23h15. Deux ours passent pendant que je dors. Ils viennent à 5 mètres des affûts. Plus tard, une femelle passera durant la nuit noire.
4h46. Je me réveille, un peu pataud. Il fallait que je dorme cette nuit. 4h50, Marie lance « glouton à droite ». L’animal, avance assez vite en se déplaçant d’un pas chaloupé. Il semble bien plus réveillé que moi. Il est magnifique avec sa bande roussâtre sur le flanc.
Alerte, l’animal trouve quelques restes de poisson ici et là. Le glouton est certes un excellent chasseur, mais son alimentation se compose souvent de carcasses d’autres animaux comme le loup ou l’ours. C’est pourquoi, on le trouve en Finlande sur le même territoire que les deux prédateurs cités.
Saviez-vous qu’on l’appelle Wolwerine en anglais et que le comics américain tire son nom des griffes de l’animal.
Après 22 minutes devant nos appareils photo, le glouton est chassé par les laridés.
5h41, le glouton est de retour par le sud-ouest. À un moment, il semble sentir quelque chose sous le sol et gratte frénétiquement la terre. Mais ne trouve rien à manger.
Il repart à 5h57. Je suis comblé !
Affût lac : une fin très calme
Installation dans l’affût à 16h30. Immédiatement, nous repérons un garrot à œil d’or et ses poussins.
Un pygargue à queue blanche pêche un poisson alors que nous nous installons dans l’affût. Il reviendra à deux reprises survoler le lac.
Des centaines de goélands bruns, cendrés, argentés et mouettes rieuses ne tardent pas à arriver. On se croirait au port de Saint-Malo ou n’importe où au bord de l’Atlantique. Mais vos gueules les mouettes ????
Dans ce capharnaüm, l’attente s’installe. Corbeaux et corneilles mantelées se joignent au festin. Les garrots à œil d’or se sont éloignés de la zone. Il ne faudrait pas qu’un goéland aille croquer un des poussins.
Nous avons le temps d’observer le va-et-vient des hirondelles de fenêtre qui ont construit leur nid sous le toit des affûts.
19h30. Un chevalier Sylvain fait une courte halte devant l’affût.
21h30, nous entendons les garrots à œil d’or qui font un boucan pas possible. Et pour cause, un renard roux vient de sortir de la forêt. Il tente d’attraper un chevalier Sylvain et un jeune garrot à œil d’or. Sans succès. Puis continue sa route loin de notre affût.
L’attente s’installe. À 00h30, tout le monde se couche, car il fait trop sombre pour faire de la photo. Le lendemain, rien de plus ne viendra devant notre affût.
Je me répète encore : la présence d’appâts ne garantie pas le passage de l’ours brun.
Cahier pratique de mes affûts photo ours bruns en Finlande
Comment s’y rendre ?
Vol international jusqu’à l’aéroport de Kaajeni (le plus proche) ou Kuopio via Helsinki. La voiture est ensuite indispensable pour se déplacer si vous voyagez par vous-même. Le centre qui gère les affûts peut aussi organiser un transfert depuis l’aéroport.
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Où dormir ? Où manger ?
Il y a deux options pour dormir au niveau du centre : dormir dans des chambres simples, mais propres et calmes. La seconde solution est de dormir dans votre van ou dans votre camping-car. Vous pouvez vous raccorder à l’électricité.
Le centre organise des repas : petit-déjeuner au retour d’affût et déjeuner en début d’après-midi (en saison estivale).
Quand y aller ?
Pour photographier l’ours brun, la période s’étale d’avril à fin octobre. Selon le climat, il peut y avoir un léger décalage sur l’entrée et la sortie de la tanière. Pendant l’hivernation, l’ours ne peut pas être photographié.
Chaque saison a son intérêt :
- Avril et début mai permet de photographier l’ours brun dans la neige
- Mi-juin-mi-juillet, on bénéficie de plus longtemps de lumière
- Fin septembre/début octobre, les couleurs d’automne apportent une touche unique aux photos. Mais attention, cette période est très courte en Finlande et varie un peu d’une année à l’autre.
Quel matériel photo emporter pour réaliser l’affût ours brun en Finlande ?
Je recommande des objectifs de 70 à 500 mm et d’emporter avec soi deux boitiers photo. Plus les objectifs ouvrent, mieux c’est car les ours peuvent venir devant les affûts lorsque la lumière est très basse.
Inutile d’emporter un trépied. Par contre une tête pendulaire est fortement recommandée.
Voyages Photos en Finlande
Suite à ce voyage, je suis en train de monter deux voyages photo avec Objectif Nature :
- Les oiseaux de la taïga au printemps
- Ours bruns, loups gris et gloutons en affût pendant l’été et à la sortie de l’hiver
Réserver les affûts photo en direct
Si vous ne souhaitez pas vous joindre à mes voyages photos, vous pouvez réserver les affûts directement auprès du centre avec qui j’ai affûté en remplissant ce formulaire :
Je connais également deux autres sites d’affût pour photographier l’ours brun. Vous pouvez adresser une demande de devis auprès de ses agences locales finlandaises également.
Ouvrages naturalistes
Le guide ornitho est la référence pour l’observation des oiseaux en Europe, Afrique du nord et Moyen-Orient. Existe aussi en application IOS et Android.
Pour l’ours brun, je recommande deux ouvrages :
- L’ours brun de Gérard Caussimont qui est certes succincts mais donnent l’essentiel des informations sur l’espèce.
- L’Ours Brun – Biologie et Histoire, des Pyrénées a l’Oural de Pascal Etienne et Jean Lauezt : L’ouvrage date de 2009 mais c’est le plus abouti sur la biologie de l’animal
Je m’appelle Grégory et je suis l’auteur de My-Wildlife, mon blog sur les safaris, l’ornithologie et l’observation animalière. Si comme moi, tu aimes la nature, suis mes conseils et inspire-toi de mes carnets naturalistes pour voyager en découvrant la vie sauvage. J’accompagne aussi des voyages photo qui offrent la possibilité de progresser en photographie tout en bénéficiant d’excellentes conditions d’observation et de prises de vue.
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