Photographier le grand tétras en affût en Finlande

Le grand tétras est un oiseau d’allure primitif un peu spécial pour les naturalistes et les photographes animaliers. J’accompagne chaque année un voyage photo en Finlande pour photographier le grand tétras en affût.

L’article comporte des photos que j’ai pu prendre en affût ainsi que celles de photographes qui m’ont accompagné sur des voyages photos.

Morphologie du grand tétras

Le grand tétras ou coq de bruyère (Tetrao urogallus) est un gallinacé de la famille des Phasianidés, tout comme le tétras lyre. Il est du genre tetrao qui comprend le grand tétras et le tétras à bec noir.

Le grand tétras mâle a un plumage majoritairement noir ; son plastron a des reflets métalliques bleu-violets ou verts, un peu à l’image de l’étourneau sansonnet. Les rectrices sont brunes ornées de quelques taches blanches. On retrouve aussi au niveau de l’épaule une petite tache blanche caractéristique de l’espèce. Les plumes de la queue sont arrondies et parsemées elles aussi de taches claires. Lors des parades nuptiales, la queue forme un évantail. La tête est, elle, ornée de caroncules rouges érectiles et d’une barbe foncée. Le bec épais et recourbé est de teinte claire.

Le dimorphisme sexuel du grand tétras est prononcé. Le plumage de la poule est principalement roux. La femelle a également des caroncules rouges sur la tête, mais ils sont moins importants que ceux du mâle. Le bec, lui aussi plus petit que le coq, est brun foncé.

Le grand tétras mâle pèse entre 2,5 et 5 kg pour 86 à 110 cm de longueur et la poule pèse quant à elle entre 1,5 et 2,5 kg pour 55 – 70 cm de longueur.

Où voir le grand tétras en Finlande ?

L’aire de répartition du grand tétras s’étend à travers l’Europe et l’Asie. C’est un galliforme qui apprécie les latitudes boréales et les forêts de conifères. C’est pourquoi sa principale aire de répartition se situe entre 50° et 66° de latitude nord, de la Norvège à l’est de la Sibérie. On trouve encore des populations sur d’autres massifs éloignés, mais pour combien de temps encore ? Je pense à l’Ecosse, aux Alpes, aux Pyrénées, aux Carpates, au Jura, aux Vosges, aux Balkans ou encore à la forêt noire. Cependant, c’est bien dans les forêts de taïga que le grand tétras trouve son habitat optimum.

Douze sous-espèces ont été décrites sur des critères morphologiques et comportementaux. En Finlande, on trouve deux sous-espèces sur l’ensemble du territoire : Tetrao urogallus karelicus dans le sud du pays et Tetrao urogallus urogallus dans le nord du pays.

La population de grands tétras en Finlande était estimée à 400 000 individus en 2018. Je n’ai pas trouvé de chiffres plus récents. Il semble que la taille de la population diminue au fil des années. En cause : les changements dans la structure par âge des forêts, la disponibilité réduite de sites de reproduction convenablement abrités (en raison des défrichements et d’autres mesures forestières), la perte de sites de parade nuptiale et le nombre croissant de petits mammifères prédateurs tels que le chien viverrin. Le grand tétras est toujours chassé en Finlande.

Nous photographions le grand tétras en affût en Finlande dans les régions de la Carélie et de l’Ostrobotnie du Nord dans des secteurs protégés et exempts d’activités humaines.

Comment se manifeste la parade du grand tétras ?

Les coqs paradent en chantant. Le son est primitif et guttural (écoutez le chant ici). Il parade aussi en se déplaçant, queue déployée, cou et têtes dressés vers la cime des arbres, barbes hérissées, cou parfois gonflé.

Les poules, elles, vagabondent sur les différents leks. Chaque femelle choisira le coq avec lequel elle s’accouplera. Généralement, il s’agit du mâle dominant.

La femelle pond en général de 5 à 8 œufs de mai à juillet qu’elle couve pendant 4 semaines. Les poussins sont nidifuges, c’est-à-dire qu’ils peuvent se déplacer dès la naissance. Ils ne sont cependant capables de voler qu’entre le 13e et 17e jour. Ils restent auprès de leur mère jusqu’à l’automne suivant.

Quand photographier le grand tétras en Finlande ?

Le grand tétras se photographie pendant la période des parades nuptiales sur un territoire qu’on nomme le lek (signifiant arène en suédois) ou la place de chant. Le grand tétras fait partie des rares oiseaux dont le mode de reproduction est basé sur la promiscuité. Le coq est polygame, l’espèce parade collectivement. Seul le mâle dominant pourra copuler les femelles.

Cette période s’étale généralement en Finlande du 20 avril au 20 mai. Veuillez toutefois noter que les conditions climatiques peuvent légèrement influer sur cette période.

Les affûts photo pour le grand tétras en Finlande

Nous photographions le grand tétras depuis des affûts. En balade pédestre, il n’y a aucune chance de le photographier et c’est même le meilleur moyen de déranger l’espèce.

Comment se déroule l’affût grand tétras ?

Nous utilisons des affûts mobiles en bois pour une personne qui disposent de 4 à 6 manchons pour faire passer les objectifs, ce qui permet d’avoir une vision à 180° de la forêt de conifère. Chaque affût dispose d’une chaise, d’un sac de couchage, d’un tapis de sol. Il n’y a pas de véritable toilette dans les affûts, mais un seau et un urinoir portatif permettent de faire ses besoins. Chaque affût est équipé d’un petit chauffage à l’éthanol dont la fonction est d’éviter le gel sur les vitres sans tain.

L’installation dans les affûts se réalise la veille de la séance photographique vers 18h00. Il est primordial d’installer son matériel photo dès l’entrée dans l’affût.

Les coqs peuvent parader dès 2h00 du matin et jusqu’à 8h00, parfois plus.

Quel matériel photo emporter pour l’affût grand tétras ?

Les trépieds sont à proscrire. Seule une tête de trépied est à emporter et à fixer sur une plaque métallique, elle-même posée sur une tablette. Je recommande chaudement d’emmener une tête pendulaire pour photographier le grand tétras. C’est plus confortable qu’une tête classique et vous serez prêt à photographier plus tôt.

Les affûts disposant de plusieurs manchons, je recommande d’emporter deux boitiers et deux objectifs, les plus lumineux possibles. La forêt boréale peut-être sombre et les coqs actifs alors que le jour n’est pas levé. Quelle focale utiliser ? Je recommande pour photographier le grand tétras en Finlande une focale de 300 mm pour les photos d’ambiance forestière et d’action (envol) et une focale de 500 à 600  mm pour les portraits. Notez cependant que c’est le grand tétras qui décide de la distance. Il peut parfois être si proche que le téléphone portable peut suffire.

Retour sur un affût grand tétras

27 avril, 18h00, je suis au point de rdv près de Kuusamo. 10 mn plus tard, nous garons les véhicules le long d’une piste et entrons dans la taïga pour rejoindre les affûts, 800 m plus loin. Nous utilisons des luges pour tirer nos affaires car la neige, encore bien présente, est molle et ça nous permet de moins nous enfoncer et de moins nous fatiguer.

A 18h30, j’entre dans mon affût pour la nuit et photographier le grand tétras le lendemain au crépuscule. 30 mn plus tard, tout mon barda est prêt. Les appareils photos sont positionnés et tout est organisé pour faire le moins de gestes et faire le moins de bruit possible. Je mange mon pique-nique, règle mon réveil pour 2h45 et écoute la forêt, le vent qui vient balayer la cime des résineux.

2h45, je sors du sac de couchage, m’assieds et l’attente commence et s’étire malheureusement jusqu’à 7h00. Le grand tétras n’est pas venu. A cause d’un printemps rude de par les nombreuses chutes de neige (il tombera encore 15 cm la nuit suivante), le froid et le vent, la parade nuptiale a 15 jours de retard cette année.

2 mai. Retour à Kuusamo pour tenter une seconde session pour photographier le grand tétras en affût. Exactement comme la première fois, je suis prêt mais inquiet car la météo annonce des rafales à 50 km/h le lendemain matin. L’affût donne sur une toute petite colline sertie de pins. Cette position légèrement surélevé est parfaite pour parader. Souvenez-vous de vos sorties en discothèque… où l’humain paradait parfois sur la piste de danse ou sur le bar. Anyway…

Je suis bien fatigué par cette succession d’affûts où les nuits ont été très courtes (4 heures en moyenne). Je pars me coucher à 21h00 et règle le réveil sur 3h15. J’ai besoin de dormir. 3h05, des gloussements rauques me réveillent, le grand tétras est déjà là. Je me lève le plus silencieusement possible tout en gardant le bas du corps dans le sac de couchage pour rester au chaud le plus possible (il fait -2°C). De peur de faire du bruit, je n’ajoute pas ma doudoune ni n’allume le chauffage à alcool. J’ai froid.

Le coq de bruyère est sur son lek face à moi. Je peine à le distinguer des pieds des résineux malgré le contraste avec la neige, car il fait encore bien nuit. Les mouvements sont lents et mesurés pour faire le moindre bruit et éviter les gestes brusques avec l’objectif qui sort de l’affût. Les premières photo sont réalisées à 2.8, 12800 isos et 1/20 de secondes. Conditions extrêmes pour faire des photos.

Il parade devant moi (pas pour moi), tête relevée, queue en éventail, il chante gutturalement, ce qui n’est pas sans me rappeler certains chants traditionnels scandinaves.

Il se trouve à moins de 20 m de mon objectif.

Il réalise de temps en temps de petits sauts que je ne peux photographier pour 3 raisons :

• mon 400 mm est trop long vu la distance qui nous sépare
• mon 70-200 mm n’est pas monter sur une tète pendulaire ; je risque de le faire fuir si je le manipule
• il fait encore trop sombre pour avoir une vitesse suffisamment élevée

3h45, le vent se lève d’un coup avec de fortes rafales (celles annoncées). Je vois que cela dérange le grand tétras. Ses chants s’espacent. A 4h05, il s’envole vers le sud, d’abord à une quarantaine de mètres puis enchaîne un second vol. Je le perds de vue.

C’est le moment que je choisis pour ajouter ma doudoune, allumer le chauffage à alcool et boit un thé tiède avec un carré de chocolat.

Le grand tétras ne reviendra pas. Il fallait se lever tôt ce matin pour avoir la chance de l’observer et de le photographier. Je suis satisfait de ma séance, car les conditions météorologiques de ce printemps sont exceptionnellement rudes.

En 2024, cinq photographes m’ont accompagné pour photographier le grand tétras en Finlande. 100% des voyageurs ont pu le photographier au moins à l’occasion d’un affût et 60% l’ont photographié à chaque affût.

Cahier pratique

Comment y aller ?

Vol international jusqu’à l’aéroport de Kaajeni ou Kuusamo via Helsinki. La voiture est ensuite indispensable pour se déplacer si vous voyagez par vous-même.

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Avec qui photographier le grand tétras en Finlande ?

J’accompagne un voyage photo avec Objectif Nature pour photographier les oiseaux et les mammifères de la taïga finlandaise au printemps. Vous pouvez vous joindre au voyage. Il est limité à 5 photographes. En plus du grand tétras, nous pouvons photographier le tétras lyre, l’ours brun, le pygargue à queue blanche, la chouette épervière et lapone (avec un peu de chance), le cygne chanteur, la grue cendrée, des passereaux, le balbuzard pêcheur…

Si vous ne souhaitez pas vous joindre au voyage photo, vous pouvez réserver votre affût directement auprès des agences naturalistes locales avec qui j’ai affûté en remplissant ce formulaire de demande de devis.

Je connais également deux autres sites d’affût pour photographier le grand tétras. Vous pouvez adresser une demande de devis auprès de ses agences locales finlandaises également.

Les ouvrages ornithologiques

Le guide ornitho est la référence pour l’observation des oiseaux en Europe, Afrique du nord et Moyen-Orient. Existe aussi en application IOS et Android.

Le grand tétras de Bernard Leclercq et Emmanuel Ménoni : Un ouvrage qui date de 2018 qui mériterait d’être actualisé mais bon nombre de chapitres restent d’actualité. La référence.

Grégory Rohart

Je m’appelle Grégory et je suis l’auteur de My-Wildlife, mon blog sur les safaris, l’ornithologie et l’observation animalière. Si comme moi, tu aimes la nature, suis mes conseils et inspire-toi de mes carnets naturalistes pour voyager en découvrant la vie sauvage. J’accompagne aussi des voyages photo qui offrent la possibilité de progresser en photographie tout en bénéficiant d’excellentes conditions d’observation et de prises de vue.

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