Lors de mon voyage naturaliste en Suède, j’ai réalisé un affût pour photographier le grand tétras, espèce emblématique de la taïga. Juste l’observer aurait suffit à mon bonheur. Retour sur cette expérience.
Vous pouvez aussi lire mon retour d’expérience sur mes affûts grand tétras en Finlande.
Le grand tétras
Le grand tétras (Tetrao urogallus – Western Capercaillie), aussi appelé coq de bruyère, est un gallinacé au même titre que le tétras lyre que j’ai aussi photographié en Suède. Il s’agit du plus gros des Galliformes d’Europe. 12 sous-espèces coexistent. En Suède, il s’agit de la sous-espèce tetrao urogallus urogallus.
Le dimorphisme sexuel est très prononcé entre mâles et femelles, autant au niveau de la taille que de la couleur du plumage. Le mâle a un plumage noir et brun avec des reflets violets et verts. Son bec est blanc et ses caroncules sont rouges. La femelle quant à elle, plus petite, a un manteau brun roussâtre barrée de noir.
L’aire de répartition du grand tétras en Europe se trouve pour l’essentiel en Scandinavie et dans l’ouest de la Russie ainsi qu’en Europe occidentale et Centrale.
En Suède, le grand tétras vit dans la taïga, cette forêt boréale composée pour l’essentiel de conifères où il aime s’alimenter dans les clairières de myrtilles.
Le grand tétras est classé sur Liste rouge européenne des espèces menacées par l’UICN en « préoccupation mineure » pour le monde et l’Europe. En France, la population est dite « vulnérable ». Partout en Europe, le nombre de grand tétras est en régression. En France, il est présent dans le Jura, les Vosges, les Cévennes et les Pyrénées. On estime qu’il y aurait 4500 individus dont 90% sur la chaîne pyrénéenne. En Ecosse, la population serait tombée à 542 en 2022 selon un rapport de la RSPB, soit une perte des effectifs d’environ 50% en seulement six ans. En Suède, comme dans le reste de la Scandinavie, la population de grand tétras reste importante (la Suède représente 40% de la population européenne de grand tétras) mais elle baisse également.
Cette baisse significative des effectifs de grands tétras est multifactorielle :
- La perte de l’habitat par la déforestation (c’est le principal facteur en Scandinavie)
- La chasse et le braconnage
- Le dérangement par l’Homme
- Le réchauffement climatique (il limiterait le taux de reproduction)
- Les causes accidentelles (grillage, câble électrique, téléski…)
- La prédation naturelle (rapaces, renard, martre…)
- Les maladies et les parasites
Une nuit d’affût pour photographier le lek du grand tétras
J’ai réalisé une nuit d’affût au printemps pendant la période du lek pour photographier le grand tétras en Suède.
« C’est un sacré challenge de photographier le grand tétras. Il est bien plus craintif que le tétras lyre. » me dit l’ornithologue suédois.
Je me souviens lui avoir demandé « Quelles sont nos chances de le voir ? »
« 50% » m’a-t-il répondu.
Récit de ce moment unique.
Installation dans la tente d’affût
Nous sommes fin avril, il est 17h00. J’ai rendez-vous sur le bord d’un lac avec des ornithologues suédois qui gèrent les affûts pour le grand tétras. Ensemble, nous prenons des pistes forestières et arrêtons la voiture sur le bord de la piste au milieu de la taïga. Nous sommes trois photographes. Nous poursuivons à pied pour rejoindre les tentes d’affût.
Une tente est dédiée à une personne afin de limiter le dérangement. A deux dans une tente, il est plus risqué de faire du bruit que seul. Une dizaine de tentes est disposée à différents endroits du site du lek (aire de parade). Pour déterminer où va chacun, les ornithologues utilisent des pièges photo pour savoir quels sont les emplacements les plus actifs.
Le Grand tétras étant actif surtout en début et en fin de journée, il est important d’arriver assez tôt sur site. Je suis dans la tente à 18h00.
L’attente
La tente est suffisamment grande pour y abriter un lit de camp pour la nuit (sac de couchage fourni). Elle dispose de quatre ouvertures pour quadriller la taïga à 360°. Après avoir installé le trépied en direction de la clairière qui offre le plus de possibilités photographiques, je commence par observer chaque recoin de la forêt.
Puis commence l’attente. La nuit tombe. Je décide donc de manger mon panier repas composée d’une salade, d’un sandwich, de brioches, de fruits, d’une bière locale et de thé. Tout en mangeant, je reste attentif aux sons de la forêt boréale.
Si aucun bruit ne filtre pendant un moment, je finis par entendre les battements d’ailes d’un grand tétras parti rejoindre les branches d’un conifère pour y passer la nuit. Tout ça près de ma tente. Il fait complètement nuit dehors. J’en profite pour m’allonger silencieusement dans mon sac de couchage et écouter la taïga. Sans m’en rendre compte, je glisse dans le sommeil. Plus tard, j’en sors, entendant le chant caractéristique de la chouette de Tengmalm. Puis me rendors, plein d’espoir pour le lendemain.
4h14, le grand tétras est devant la tente
J’ai mis la montre à sonner à 4h00. Je me lève silencieusement, me couvre et pars m’assoir sur mon siège d’affût tout en prenant un thé, encore chaud bien que préparé la veille.
A 4h14 précise, j’entends un battement d’ailes. Un grand tétras vient de se poser devant la tente. Si près que je ne peux faire le point avec le 400 mm 2.8 dont la distance minimale est à 2,70 m. Le grand tétras est si proche que je n’ose pas bouger pour prendre un autre objectif. Je peine à le voir dans cette obscurité. Il s’éloigne un peu. L’autofocus galère. Je finis par faire une photo. Il s’éloigne davantage. Je le perds de vue. La photo est naze mais le moment fut magique.
5h37. J’entends le grand tétras chanté sur ma droite. C’est un chant surprenant qu’on ne pourrait confondre avec aucun autre chant d’oiseau. C’est une strophe rauque ponctuée de claquements et de sons graves, parfois ponctuée de croassements. Si vous n’avez jamais entendu le chant du grand tétras, allez l’écouter sur Xeno Canto. Puis c’est le silence. Le mâle reprend sa strophe une trentaine de secondes plus tard, s’arrête à nouveau puis reprend son chant. Cela dure ainsi quelques minutes. Lorsque soudain, je l’aperçois dans la clairière sur ma droite. Je n’ose bouger mon trépied et mon 400 mm qui ne sont pas dans cette direction. Je m’approche de l’ouverture de la tente avec mon 50-140 mm Fujifilm lorsqu’il chante car à ce moment précis, il est comme sourd. Je le photographie. Cou tendu vers la cime des arbres, le bec à la verticale, la queue en éventail tout en hochant la tête avec frénésie, il chante à une vingtaine de mètres de ma tente d’affût. Je jubile.
7h44. J’entends un bruit de frottement à l’arrière de la tente. Un mâle grand tétras se déplace dans le tapis forestier. Il ne fera que passer. C’était ma dernière observation de grands tétras à l’occasion de cet affût.
En sortant de la tente, j’ai les yeux qui brillent. Près des voitures, nous nous réunissons tous autour d’un petit-déjeuner et partageons notre sentiment sur cette expérience. A refaire, c’est sûr !
A savoir : Le lek du grand tétras n’a rien à voir avec le lek du tétras lyre. Chaque coq a son propre site où il essaie d’attirer une femelle. Lorsque les femelles arrivent sur la zone de l’aire de la parade nuptiale, elles choisissent généralement le même mâle, le plus grand, le plus fort et le plus beau. C’est alors à ce moment là que les autres mâles vont rappliquer et qu’il va y avoir des intimidations, des combats, des fuites et par la suite des accouplements. Je suis arrivé un peu après cette période.
Cahier pratique – Grand Tétras en Suède
Comment s’y rendre ?
Vol international jusqu’à l’aéroport Arlanda de Stockholm. La voiture est ensuite indispensable pour se déplacer si vous voyager par vous-même. Les ornithologues locaux donnent un lieu de rendez-vous et vous conduise sur le site du lek du grand tétras.
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Avec qui faire son voyage naturaliste en Suède ?
Pour votre voyage naturaliste dans le centre de la Suède, je vous conseille d’adresser votre demande de voyage sur mesure auprès de l’agence locale avec qui je suis parti. Je l’ai sélectionnée pour son sérieux et sa connaissance faunistique de la région. Contactez Sylvia, Experte sur le centre de la Suède.
Quand photographier le grand tétras en Suède ?
La saison pour photographier le grand tétras s’étend du 1er avril au 5 mai environ. La meilleure période se situant généralement sur la seconde quinzaine d’avril. Mais cela peut varier d’une année sur l’autre.
Quelle matériel photo pour photographier le grand tétras ?
Je recommande l’usage d’un matériel photo permettant de photographier dans de faibles conditions de lumières : optiques à ouverture 2.8 de préférence et appareils photos plein format gérant bien la montée en iso. Allez lire mon article Quel appareil photo pour la photographie animalière ? pour faire le bon choix.
Ouvrages recommandés
Le guide ornitho est la référence pour l’observation des oiseaux en Europe, Afrique du nord et Moyen-Orient. Existe aussi en application IOS et Android.
Concernant le grand tétras, je recommande l’ouvrage Le Grand Tétras de Bernard Leclercq et Emmanuel Ménoni.
Je m’appelle Grégory et je suis l’auteur de My-Wildlife, mon blog sur les safaris, l’ornithologie et l’observation animalière. Si comme moi, tu aimes la nature, suis mes conseils et inspire-toi de mes carnets naturalistes pour voyager en découvrant la vie sauvage. J’accompagne aussi des voyages photo qui offrent la possibilité de progresser en photographie tout en bénéficiant d’excellentes conditions d’observation et de prises de vue.
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